Bridget Jones, une belle histoire gâchée !

Le premier film dont nous parlerons ce soir, il s'agit de Bridget Jones, le film du moment, dont on vient de parler dans la rubrique Des lettres et puis des lettres, et au sujet duquel je laisserai quelques minutes à Djette Klarabel à la fin de cette chronique pour donner son avis. Car l'avis qui est le mien est nécessairement un avis biaisé. Pour tout dire, j'ai pas aimé le film, ou plutôt, j'ai pas assez aimé le film pour en dire du bien, et pas assez détesté le film pour en faire une coprophagie bien sentie dans l'émission suivante. En fait, le film ne m'a apporté aucune émotion particulière, patte reconnaissable entre toutes de la petite comédie américaine surmédiatisée… Le fait est sinon, que je dois avoir un sérieux problème avec les journaux en général. Je passerai sur le pensum de Robert Bresson, le journal d'un curé de campagne, et je profiterai lâchement de l'absence de Geneviève pour rappeler à quel point j'honnis le film journal intime de Nanni Moretti, qui est tellement chiant qu'il endormirait un âne.

Mais revenons au journal de Miss Jones, qui nous concerne aujourd'hui ; Si je laisserai l'avis final à notre Klarabel, c'est que je n'ai pas eu le loisir de lire le livre à succès d'Helen Fielding et que tout le film s'articule autour de celui-ci. Le seul avis que je peux donner est donc uniquement cinématographique, en commençant par le point fort du film, puisqu'il y en a au moin un. Et ce point fort, réside en Renée Zelweigger, l'actrice pourtant fort controversée qui joue le rôle de Bridget, et qui est en tout point épatante. Controversée, elle le fut parce que la jeune fille est américaine, et le journal, comptant ses plus farouches fans dans les pages de Cosmopolitan UK, se devait pour celles-ci d'avoir une héroïne anglaise. En effet, la comédie sentimentale à l'anglaise est considérée comme un monument historique outre-manche depuis le succès de 4 mariages et un enterrement, et beaucoup d'anglais pense que cette marque de fabrique ne peut pas leur échapper. Pourtant, Renée, qui à pris dix kilos pour le rôle est parfaite, et on peut même dire qu'elle sauve le film du naufrage à plusieurs reprises, par un talent consommée pour le charme et le naturel devant l'écran, doublé d'un sens inné pour la légèreté et la comédie, talent déjà décelé dans un film qui fut présenté à Cannes en 2000, Le Nurse Betty de Neil LaButte, grand indépendant américain. Une légèreté et un charme qui n'est pas sans rappeler celle d'une autre actrice américaine, Meg Ryan.

Arrivé à ce point, peut être que certains d'entre vous voient très clairement là où je veux en venir. Oui, si Zelweigger se débrouille si bien dans cette fade bluette caractérisée de "Comédie anglaise", c'est peut être tout simplement parce qu'elle n'a absolument rien d'anglaise mais se confond peut être tout simplement avec son double anglo-saxon, la comédie sentimentale à l'américaine. Car pour tout dire, quelle différence y a-t-il entre les deux ? Les deux sont produites par des grands studios Hollywoodiens, les deux parlent d'amour et de la difficulté d'être aimé, les scènes de pubs sont remplacé par des ballades dans Central Park, mais à part ça, il ne faut pas tomber dans le mythe entretenu de la vrai comédie anglaise pur sucre. Ce mythe est en autre entretenu par le fait que les comédies sentimentales anglaises sont écrite par un scénariste omnipotent, Richard Curtis. Mais il faut se rendre à la réalité. Si 4 mariages fut une vrai réussite, y compris et surtout une réussité d'écriture, l'individu est depuis longtemps devenu un tâcheron d'Hollywood parmi d'autres. Et le film de Sharon MacGuirre n'échappe pas à la règle, il n'est en aucun cas un film anglais, car il n'a pas la finesse et le côté "ça ne peut se passer qu'à Londres" qu'il y a dans d'autres productions. Si vous avez le câble, où si vous avez eu l'occasion de voir Canal plus ces temps-ci, attardez vous sur Fish and Chips, le film anglais de Damien O'Donnel sur la communauté pakistanaise de Londres… Et vous verrez la différence. Car le cinéma anglais a une caractéristique que n'ont pas ces comédies sentimentales anglo-saxonnes. C'est que chaque plan, même si drôle soit-il, est un pan de réalité sociale qu'on se prend dans la gueule, mais pas seulement, certaines distances rêveuses sont prises avec la réalité parfois, pour y amener du nonsense. On pense à plein de modèles du genre, mais il suffira de citer les deux bombes de Stephen Frears, dont il sera question plus loin, The Snaper & The Van, pour ce convaincre réellement de ce qu'est une véritable comédie à l'anglaise. Dans toutes les comédies anglaises également, il est question d'homosexualité, communauté qui jouit d'une certaine bienveillance culturelle outre-manche. Dans une comédie anglaise (et c'était le cas dans 4 mariages), on ne verra pas un homo parler comme une grande folle, ou être stigmatisé comme tel. Et pourtant, dans Le film qui nous concerne aujourd'hui, c'est le cas ; le meilleur ami de Bridget est homo, et tombe malheureusement dans ce genre de travers. La comédie anglaise est par définition une comédie de mœurs, une comédie sociale trs honnête. Hors, il n'y a pas ce type de choses dans des comédies comme Bridget Jones ou Coup de foudre à Notthing Hill. La seule chose qu'il y a peut être de différent, c'est les relents d'humour de mauvais goût qui emplisse parfois l'écran. Ainsi, la scène la plus drôle de Bridget, c'est sans nul doute celle du début, lorsqu'elle prend comme résolution de changer de culotte tous les jours et qu'un plan fugace nous montre son immonde petite culotte de la veille collée à sa cuisse. Le film commence comme ça mais se tarit assez vite, pour tomber dans la platitude, mais, soyons honnête, rarement dans la niaiserie. Pour le reste, rien ne fait la différence. Le film est une salade composé pas très digeste entre Quand Harry rencontre Sally (comédie américaine),4 mariages, vous avez un message et Coup de Foudre à Notting Hill, soit les quatre comédies qui ont le plus marché ces 10 dernières années. Hugh Grant, acteur dans trois des quatre comédies précitées, est le lien entre toutes, et le moins qu'on puisse dire, c'est que celui qui avait fait illusion dans la première production du scénariste Richard Curtis n'en finit plus d'être agaçant, jouant avec toujours cette même lourdeur le play-boy maniéré au sourire enjôleur. Pire, cet acteur anglais qu'on avait aucun mal à voir se réveiller dans un pyjama aux armes de Tottenham dans 4 mariages, n'est plus du tout crédible en acteur anglais, à un tel point que Zellweiger, texane pur jus, ferait presque plus anglaise que lui.

Pour en finir avec ce film, je dirais que c'est un fabuleux ratage, car le personnage de Bridget, et la critique du livre nous le confirme que mieux, est plus qu'attachant, et qu'il est évident que de ce bouquin, on aurait pu tirer autre chose, de beaucoup plus fin, de beaucoup plus drôle et surtout de beaucoup plus fédérateur que cette soupe un peu difficile à digérer. On pense à un autre film, d'un vrai anglais ce coup-ci écrit par un vrai anglais lui aussi, il s'agit de Haute Fidélité, le film de Stephen Frears, écrit par le cockney Nick Hornby, qui raconte lui aussi les difficultés d'un jeune londoniens trentenaire, un peu le pendant masculin de Bridgett, joué par un John Cusack, dont j'appelle de tous mes vœux qu'on les voient tous les deux à l'affiche un jour, lui et Zellweiger… Mais un film qui était réalisé par un vrai réalisateur et scénarisé par l'auteur lui même donnait forcément quelque chose de différent. Quelque chose que le très commercial Bridget Jones n'a visiblement pas eu le courage artistique d'avoir
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