Défense d'entrer... Défense de regarder !

 

Cette semaine, j'ai encore regardé un truc tout craignos à la télé. Privilège de la fonctionnaire sans poste que je suis devenue, je peux, à loisir, me gargariser de tout un tas d'imbécillités sans honte aucune. Non, aujourd'hui je n'ai plus aucun remords à regarder Love Boat pendant une heure et demi chaque matin, alors que la simple idée de me laisser prendre au jeu pendant mes vacances d'autrefois me donnait des frissons dans le dos. Et puis c'est pour la bonne cause que je fais ça, pour vous chers auditeurs et fidèles internautes qui vous rendez toujours plus nombreux sur notre beau site qui tue.

Mercredi soir, j'ai découvert avec effarement un autre de ces trésors que recèle la grille des programmes de TF1, une émission d'apparat vraisemblablement, puisque le père Mougeotte ne nous la sort qu'environ une fois par mois. Mais quel dommage ! Oui, quel dommage de se priver d'une émission de qualité telle que Défense d'entrer, au cours de laquelle sont diffusés des reportages réalisés par les meilleurs journalistes d'investigation du monde entier !

A l'instar de Vis ma vie, Défense d'entrer est présenté, comme c'est original, par une animatrice ni belle ni moche, qui paraît-il, si l'on en croit la presse people d'il y a 3-4 ans, était un infâme boudin avant d'être l'agréable demoiselle qu'elle est devenue. Je ne fais d'ordinaire pas trop confiance à ce genre de magazine, mais je préfère croire que c'est vrai, parce que du coup, ça voudrait dire que j'ai peut-être une chance d'entrer un jour chez TF1… Cette jeune femme, Valérie Bénaïm, est flanquée de deux Playmobil et d'une gourde, parce que c'est bien connu, une femme seule ne peut pas assurer un prime time. Je dis c'est bien connu, en fait on n'en sait rien du tout vu qu'aucun patron de chaîne n'a jamais eu les organes nécessaires pour oser le faire… Mais ne cherchons pas la polémique militante, je sais bien qu'un jour on vous émasculera tous !

L'invité de l'émission de mercredi était l'un des invités abonnés chez TF1 ; c'était pas Bigard, c'était pas Bedos, c'était pas Sardou, c'était donc l'autre : Michel Leeb ! Un Michel Leeb très en forme, puisqu'il a démarré sur les chapeaux de roue avec cette magnifique imitation du Chinois qui faisait un malheur en son temps.
Dès le début de l'émission, on attire bien entendu le chaland à coup de publicité racoleuse pour le dernier reportage de la soirée, un peu chaud, ou du moins censé l'être. Je n'en dis pas plus, on reviendra dessus plus tard.

Les deux premiers reportages sont assez fadouilles, le premier concernant la fabrication des plats factices qu'on met en vitrine dans les restaurants au Japon, le deuxième ayant trait au couturier du Pape. Le retour plateau après ce reportage est pitoyable, puisqu'on retrouve Michel Leeb, plus désopilant que jamais, en train d'imiter l'accent italien avec des embrasse de rideaux à pompons sur la tête. Pour rafraîchir l'atmosphère, on lance le 3ème sujet, qui relate le périlleux remplacement des requins dans un grand aquarium. Pas très passionnant, on nous explique que c'est dangereux, des fois qu'on s'en soit pas douté. Le retour plateau est quant à lui totalement affligeant. L'un des Playmobil chroniqueur s'approche d'un aquarium, dans lequel on a mis des poches de glace pour maintenir l'eau à température, puisque les bestioles qui sont dedans, des trucs préhistoriques qui ressemblent à des gros cloportes, sont habitués à vivre jusqu'à 2000 mètres de fonds et doivent rester dans une eau à 4°C. Bon, je me dis c'est bien, c'est instructif. Ben que croyez-vous qu'il a fait l'autre abruti de Leeb ? Il a sorti un bestiaux de la flotte et a joué avec un disant que c'était un téléphone portable. Vous imaginez un peu le tableau ? Cette pauvre bête, que l'Evolution a laissé sur le bord de la route au temps des dinosaures, vit depuis des millions d'année dans la flotte, très profond. On imagine qu'elle doit pas avoir une vie bien stressante. Et d'un seul coup, il y a une espèce d'andouille qui :
1°) la sort de sa flotte,
2°) la sort de sa flotte pour la mettre à l'air libre dans un studio où il doit faire à peu près 30°C.
Vous trouvez ça humain ? Mais que fait la SPA bon Dieu d'bois !

Bref. Du coup, l'émission a enchaîné sur la consternante lubie d'un sexagénaire fortuné de la Côte d'Azur, à savoir l'aménagement d'un abri anti-atomique. Il témoigne anonymement parce qu'il veut pas être emmerdé des fois qu'il y aie une guerre. Ben oui, il manquerait plus qu'il y en ait qui viennent frapper à la porte de son abri le jour où tout va péter ! Je vous passe les détails de l'aménagement : rations militaires, radio longue portée (jusqu'en Australie !), magnétoscope… Toujours est-il que pendant qu'il y a des irakiens et des afghans qui crèvent de faim, monsieur claque 300 000 balles dans son abri de merde.

Et puisqu'on est dans la futilité, restons-y avec le sujet suivant, qui concerne la vente aux enchères des diamants. On s'en fout un peu pour tout dire, mais le retour plateau m'a permis d'apprendre quelque chose que j'ignorais jusque là, à savoir les raisons pour lesquelles les diamants coûtent cher. Allez, je ne suis pas ingrate, je vais vous donner ces deux raisons, alors que vous n'avez même pas regardé Défense d'entrer :
1°) parce que c'est rare,
2°) parce que c'est difficile à trouver.
Ca vous en bouche un coin, hein ? Après ça, c'est une débauche d'objets inutiles pour bourgeois en mal de sensations fortes : un portable à 280 000 balles tout en diamant, ainsi qu'un maillot de bain d'une vulgarité digne des pires costumes du Crazy Horse, serti de 900 diamants et qui coûte la modique somme de 3 millions de francs. Je ne sais pas combien la jeune fille qui portait cette horreur a payé le siliconage de ses seins, mais vu l'ampleur des dégâts, j'ose espérer que le chirurgien qui l'a charcutée lui a fait un prix.
Le sujet suivant nous montrait jusqu'où pouvait aller la connerie humaine, même post mortem : des américains s'envoient en l'air après leur mort en faisant mettre leurs cendres sur orbite. No comment, si ce n'est que c'est très poétique, dixit l'équipe de l'émission qui a utilisé ce mot au moins 15 fois rien que pour ce sujet. Je noterai juste que ce sujet a fait dire à l'un des Playmobil, je cite : "Un petit sourire, un petit clin 'œil à la mort, parce qu'après tout, ça fait aussi partie de la vie". Après Philippe Djian la semaine dernière, à mon tour de voler haut dans la réflexion…

Après l'arrivé de la plantureuse Maïté sur le plateau, l'équipe en a profité pour goûter des "alicaments", bouffe new age censée nous procurer santé et bien être. Une bonne idée pour enchaîner avec le sujet suivant, moins glamour que les derniers avec lesquelles Valérie Bénaïm nous appâte depuis le début : un reportage sur l'analyse scientifique des aliments. Reportage là encore tout à fait instructif, puisque j'y ai appris, je vous le donne en mille, que la fraude alimentaires est une question de gros sous. Ah bon ? Suite au reportage, on apprend que le top du snobisme d'aujourd'hui est la dégustation d'huile d'olive. Ah… Les mœurs du Bobo me resteront donc définitivement incompréhensibles.

Et là, on sent que l'émission touche à sa fin, parce que les sujet les plus brûlants arrivent. Le premier de ces sujets concernent un "homme de l'ombre", en l'occurrence l'intendant des soirées de l'ambassadeur à Rome. Bon ben j'ai été déçue, y'avait pas de Ferrero Rochers. Alors de deux choses l'une : soit l'intendant est une chèvre et ses réceptions sont toujours pourries, soit la pub est mensongère, au quel cas on se demande ce que fout le BVP. En tout cas, moi je suis tombée de haut quand j'ai vu qu'il n'y avait pas de Ferrero Rocher chez l'ambassadeur.

Retour plateau, où on apprend que des téléspectateurs ont été choqués du caractère spartiate des cellules VIP, qui ont fait l'objet d'un reportage dans une précédente émission. Je n'ai eu qu'un commentaire, masqué par un tonitruant "J'te foutrais tout ça en taule" de Franpi. Cela dit, masqué ou pas, c'est pas grave, je disais la même chose…

Après ce révoltant intermède, c'est la troisième coupure pub de l'émission, qui annonce les reportages les plus chauds. Tiens, c'est marrant, la gamine qui joue dans cette pub pour de la soupe me dit quelque chose… Bon sang mais c'est bien sûr, c'est la morpionne qui joue avec Michel Leeb dans Madame Doubtfire et qu'on a vu au début de l'émission !

On revient sur le plateau, et, après un ridicule reportage sur la baraque tape à l'œil de Michel Leeb, on entre dans le vif du sujet, et ce avant 23 h et sans aucune signalétique CSA en bas de l'écran… Dans ce reportage "réservé aux adultes", pompeusement intitulé "Les esclaves sexuels", on entre dans un club SM de Paris, où sont vendus des hommes et des femmes aux enchères, le temps d'une petite gâterie. On apprend que dans ce club se rencontrent régulièrement des médecins, des PDG, des journalistes, des psys… ce qui fait dire à la patronne "Pourquoi des gens aussi socialement bien placés se prêtent-ils à ce jeu ?". Ben… parce que c'est leur truc ! Je ne savais pas que les pratiques sexuelles étaient soumises à critères sociaux !

Ce reportage est, sur tout sa durée, totalement grotesque, ça sent le bidonnage à plein nez. Mais c'est pas grave, ça fait de l'audience ! Ce qui me fait délirer dans l'histoire, c'est que ce reportage était censé, je pense, être choquant. Et je dois reconnaître que j'ai été choquée, mais pas par le fond… Ce qui m'a scandalisée, ce ne sont pas les pratiques sexuelles de ces bourgeois parigots en quête de sensations fortes, ce sont les huées du public au retour plateau, huées encouragées par les animateurs et l'invité.