La Vache


Les huit tomes des aventures de l'agent secret Pi=3,1416 sont un exemple, parmi d'autres, de ce que peut produire de meilleur la bande dessinée belge contemporaine.

Ces huit BD nous plongent dans un univers où les animaux s'écrasent devant les hommes mais n'en pensent pas moins... Et non contents de penser, ils parlent, et agissent même, au nez et à la barbe des hommes qui les jugent bien trop bêtes pour être capables d'autant de choses. Seulement comme chez les hommes et comme chez Candy, il y a des méchants et des gentils. Les méchants veulent bouffer les hommes et s'emparer du pouvoir quand ils sont des bêtes et veulent spolier voire détruire les bêtes - et la planète - quand ils sont des hommes ; les gentils, emmenés par une vache agent secret superstar, tentent de les en empêcher, et de faire en sorte qu'hommes et bêtes continuent de partager la planète en bonne intelligence.

Loin d'être une BD bêtasse et écolo version Manu Chao, La Vache est un excellent prétexte à l'expression de ce mauvais esprit subversif à la mode belge, dont Noël Godin est l'un des fervent trublions, à ce détail près que Noël Godin représenterait plutôt la branche anarchiste de ce courant, et La Vache la branche marxiste. Mais n'ayez pas peur de ces grands mots, car il n'est nul besoin d'être un fin politicien pour aimer feuilleter ces BD. Il suffit juste d'aimer l'humour, le cynisme et le mauvais esprit pour se prendre au jeu et devenir accro aux aventures de Pi.

Le style de De Moor (fils) et Desberg est inimitable : l'intrigue, bien ficelée, est toujours servie accompagnée d'un savant dosage entre discours politique construit et jeux de mots faussement ringards (le faux jeu de mot ringard étant quasiment une constante dans la BD belge), mise en image par un patchwork constitué des dessins narrant l'histoire elle-même et d'incrustations de visuels complètement décalés mais en fait pas tant que ça, qui donnent justement ce petit côté subversif à la BD. Difficile à décrire, mais résultat garanti !