James P. Johnson

 

L'artiste mort d'aujourd'hui est James P. Johnson, pour la plus grande joie de mes partenaires, le regard brillant d'espérance et qui vivent cette émission comme une libération, car je quitte le ragtime pour le jazz. Mais au risque malgré tout de les décevoir, je tiens à avertir que le compositeur d'aujourd'hui - un pianiste - se situe comme un héritier direct du ragtime durant les premières années de l'émergence du jazz au USA et à travers le monde. Car, enfin, même si le jazz globalement ne descend pas directement du ragtime, certains styles en sont quant à eux pleinement issus et de toute manière le ragtime à influencer le jazz qu'on le veuille (comme moi), ou non (comme mon producteur-animateur-réalisateur-et tu peux aller me chercher un café avec merci, j'ai nommé Franpi). Quant à la muse - parfois absente - de cette émission - Geneviève - je l'a soupçonne de garder une neutralité courtoise bien que son penchant maladif et criminel pour les pouëts dissonants de Coltrane l'inciterait plus volontiers à soutenir l'autre azimuté des escourdes. Et d'ailleurs, le premier titre estampillé jazz qui fut enregistré - en 1917 - par The Original Dixieland Jazz Band - ne s'appelait-il pas Tiger Rag ? N'est-ce pas une preuve ? Vous en voulez une autre ? Certains titres de James P. Johnson et de Jelly Roll Morton s'appelait rag, comme le "Steeplechase Rag" (17) ou le "Twilight Rag" (15).

James P. Johnson, né en 1894 à New Brunswick (Etat de New York), est l'un des plus grands pianistes de jazz de tous les temps, ce qui ne fait pas une longue période : le 20ème siècle en vérité. L'équivalent la vie d'un homme actuel. Mais entre 5214 et 36500 générations d'éphémères selon les espèces. C'est fou quand on y pense. Il est possible que chez les éphémères, le jazz soit redevenu la musique populaire qu'elle était à l'origine avant que certains musiciens élitistes décident après la période swing que ce genre musical devait devenir monstrueusement inaudible pour des oreilles, un cerveau et un cœur normalement constitués.

Quoi qu'il en soit James P. Johnson fut le roi du stride piano. Le stride piano, né dans les années 20, est ce style jazz issu directement du ragtime qui apporta deux nouvelles caractéristiques :
Au niveau de l'accompagnement, les basses (temps 1 et 3) ne sont plus des octaves mais des notes graves uniques incisives, ou bien des dixièmes, plus "harmoniquement" agréables à entendre que les lourds octaves du ragtime. Ces dixièmes sont souvent jouées "roulées", c'est-à-dire que la première note de la dixième est jouée légèrement avant la seconde :
Le rythme est en général beaucoup plus élevé qu'en ragtime classique et le passage rapide des basses (temps 1 et 3) aux accords plaqués (temps 2 et 4) a donné le nom de stride piano (stride = enjambées) à ce style de musique. D'autre part, L'élévation du rythme a obligé à jouer les accords de manière plus sèche qu'en ragtime classique.
Au niveau rythmique, c'est le swing, c'est-à-dire le vrai rythme de jazz, qui prend le dessus, donnant au stride un air plus decontracté :
James P. Johnson commença par travailler dans les club au alentours de 1913 et fut rapidement reconnu comme un leader en matière de piano évidemment... parce qu'en matière de physique quantique il avoua à la fin de sa vie n'avoir toujours rien compris. En 1917, James P. Johnson commence à créer des rouleaux pour pianos mécaniques. Duke Ellington appris beaucoup de ceux-ci (en les ralentissant leur vitesse de moitié) et peu de temps plus tard Fats Waller devint l'élève de James P. Johnson qui restera son inspirateur. C'est aussi durant les années 20, qu'il commença à enregistrer ses premiers titres et albums :
- Carolina Shout (1917)
- Yamekraw and Others Selections (1921)
- James P. Johnson (1921)
- Watch Me Go (1921)
- l'excellent James P. Johnson et Perry Bradford (1921)
- l'exellent Snowy Morning Blues (1930)
- Rent Party Piano (1943)
- le très bon The Original James P. Johnson 1942-1945 (1943)
- Jazz Band Ball (1944)
- le bon Ain'tcha Got Music (1944)
- l'excellent James P. Johnson Play Fats Waller Favorites (1944)
- The Daddy of The Piano (1950)
- Stomps, Rag and Blues (1951)
- Rent Party (1953)
- Early Harlem Piano, Vol 2 (1954)
- Harlem Rent Party (1955)
- Backwater Blues (1955)

Il devint la star des nuit d'Harlem, où il donna des soirées avec Fats Waller et Willie "The Lion" Smith. C'est durant ces années qui écrira ses meilleurs titres. En 1923, il écrivit pour le spectacle de Broadway - Running Wild - dans lequel il reprit des titres de ses premiers albums "The Charleston" (16), et surtout "Carolina Shout" (2) qui deviendra le morceau-test pour les autres pianistes, mais aussi "Old Fashioned Love" (9), "If I Could Be With You One Hour Tonight" (18) et "A Porter's Love Song To A Chambermaid".

James P. Johnson, qui fut le pianiste le plus sophistiqué des années 20, fut aussi l'un des accompagnateurs piano des artistes de blues tels que Bessie Smith avec qui il joua "Backwater Blues" (19) par exemple et Ethel Waters avec il joua pour sa part " My Handy Man" (20). Outre ses enregistrements solos, il dirigea aussi plusieurs hot combos - ces petites formations jazz de l'époque. Il partagea les spotlights avec Fats Waller à plusieurs occasions. Et parce qu'il s'intéressait aux longues compositions "classiques", il passa les années 30 à composer principalement des œuvres telles que "Harlem Symphony", "Symphony In Brown", et un opéra blues, mais se fit plus rare sur scène. Malheureusement, la plus grande partie des ses œuvres furent perdues. Il recommença à enregistrer en 1939. Il termina sa carrière en 1951. Il mort en 1955 à New York
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