Eric Dolphy

Eric Dolphy, celui que Zappa honorait à la fin des années 60 dans un barbecue géant (voir l'album "Weasels ripped my flesh") reste une comète qui a révolutionné le Jazz pendant les six années de sa courte carrière, seul en leader ou avec ses mentors, Charlie Mingus et John Coltrane.

Eric Dolphy est né le 20 juin 1928 à Los Angeles. On ne sait pas grand chose de sa jeunesse, qui a du être fort studieuse, puisque lorsqu'en 1958, à l'age de 30 ans, il enregistre son premier disque dans l'orchestre de Roy Porter, un obscur tâcheron de Los Angeles, il se distingue déjà par sa qualité de multi-instrumentiste. En effet, il est fort rare à l'époque -et même maintenant aujourd'hui, du moins avec autant de talent ;o)- de trouver quelqu'un qui joue aussi bien du saxophone alto, de la clarinette basse, et surtout de la flûte, qui est sans doute l'instrument qu'il a fait le plus évoluer, du moins celui qu'il a le plus habité.

En 1959, il rencontre Chico Hamilton, qui l'engage et Dolphy s'embarque pour New York. C'est là qu'il rencontre Charlie Mingus, de qui il devient très vite un des lieutenants dans le Charles Mingus' Quartet. 1960 est l'année des débuts de Dolphy en tant que leader : Pour le label Prestige, il enregistre un concert au Five Spot, avec le trompettiste Booker Little et Max Roach. On le retrouve surtout dans le mythique "Free Jazz" d'Ornette Coleman, où il est sans doute repéré par John Coltrane, alors chez Atlantic. En 1961, après avoir enregistré un "Candid Dolphy" avec la crème du jazz d'avant-garde de l'époque (Mingus, Abbey Lincoln, Tommy Flanagan…), il retrouve Coltrane sur les sessions célébrissimes du "Village Vanguard".

Et puis c'est l'album Olé ! qualifié par les critiques de l'époque d'Anti-jazz, tellement précurseur qu'il est encore aujourd'hui d'une modernité sans égal. Enregistré en quelques prises par des musiciens sur un nuage : Coltrane et Dolphy bien sur, mais aussi Freddie Hubbard, Elvin Jones, Mc Coy Tyner, il est un disque indispensable. Sur le morceau éponyme, la flûte de Dolphy s'offre des soli enflammés qui le range à tout jamais dans le Panthéon des amoureux du jazz. Certains musiciens de Rock, comme Ian Anderson, le flûtiste leader de Jethro Tull, le reconnaissent comme l'un des précurseurs de la musique moderne.

Après plusieurs tournées, avec son propre groupe ou avec l'Orchestra USA, il enregistre ce qui reste son album solo le plus connu, "Out of Lunch", sur le label Blue Note. Rejoignant Mingus dans son sextet, il part dans une longue tournée européenne, où il décide de s'installer. En 1964, il enregistre avec des musiciens allemands deux albums magnifiques et posthumes : Stockholm sessions et Berlin Concert sorti sur l'excellent label Enja. C'est à Berlin qu'il s'éteint, le 29 juin 1964, après une attaque de diabète qui le plonge dans un coma dont il ne reviendra pas.